Deux articles parus dans la presse (Rivarol ; Le Monde des Livres) :
- sur Maximilien Heller d'Henry Cauvain, roman policier datant de 1871
- sur les Ecrits sur le théâtre de Meyerhold (1874-1940)
Article paru dans Rivarol (12 juin 2009) sur Maximilien Heller d’Henry Cauvain, L’Âge d’Homme, 200 pages, 18 euros.
« Il est aussi longiligne, misanthrope, logique, intuitif que Sherlock Holmes ; il a lui aussi un médecin pour confident et faire-valoir, mais l’écrivain français Henry Cauvain imagina dè 1871 ce héros sombre et tourmenté qui recourt à l’opium comme l’Anglais à la cocaïne, soit seize ans avant que Conan Doyle ne publie les premières enquêtes du détective de Baker Street.
Celle de Maximilien le conduit, sous la Monarchie de Juillet finissante, de Paris au fin fond de la Bretagne sur les traces de trois redoutables tueurs et malfaiteurs qui se révéleront finalement n’en faire qu’un, diabolique personnage qui annonce le terrible Moriarty. On n’en révélera pas davantage pour ne pas déflorer ce roman policier – visiblement écrit sous l’influence d’Edgar Allan Poe – dont le style tout à la fois bonhomme et corseté fleure bon son XIXe siècle.
Qui est ce Cauvain ignoré des dictionnaires spécialisés, notamment celui de Jean Bourdier ? Lydwine Helly nous l’apprend dans son intéressante préface ». J. L.
« Il est aussi longiligne, misanthrope, logique, intuitif que Sherlock Holmes ; il a lui aussi un médecin pour confident et faire-valoir, mais l’écrivain français Henry Cauvain imagina dè 1871 ce héros sombre et tourmenté qui recourt à l’opium comme l’Anglais à la cocaïne, soit seize ans avant que Conan Doyle ne publie les premières enquêtes du détective de Baker Street.
Celle de Maximilien le conduit, sous la Monarchie de Juillet finissante, de Paris au fin fond de la Bretagne sur les traces de trois redoutables tueurs et malfaiteurs qui se révéleront finalement n’en faire qu’un, diabolique personnage qui annonce le terrible Moriarty. On n’en révélera pas davantage pour ne pas déflorer ce roman policier – visiblement écrit sous l’influence d’Edgar Allan Poe – dont le style tout à la fois bonhomme et corseté fleure bon son XIXe siècle.
Qui est ce Cauvain ignoré des dictionnaires spécialisés, notamment celui de Jean Bourdier ? Lydwine Helly nous l’apprend dans son intéressante préface ». J. L.
Article paru dans Le Monde des Livres, édition du 3 juillet 2009, à l'occasion de la parution aux éditions l'Âge d'Homme du tome II des Ecrits sur le théâtre de Meyerhold :
Béatrice Picon-Vallin, spécialiste de l'oeuvre de Vsevolod Meyerhold (1874-1940) : "Meyerhold n'a jamais renoncé à son utopie"
En 1975 paraissait le tome II des Ecrits sur le théâtre, du metteur en scène russe Vsevolod Meyerhold (1874-1940), contemporain de Stanislavski. Ce volume étant épuisé, Béatrice Picon-Vallin en publie aujourd'hui une passionnante réédition, revue et augmentée. Entretien.
D'où vient votre intérêt pour Meyerhold ?
Il est né à travers des rencontres : avec un poète, Maïakovski, à qui j'ai consacré mon DEA, et un metteur en scène, Lioubimov, le directeur de la Taganka, à Moscou, chez qui je suis allée faire un stage à la fin des années 1960. J'étais donc un peu préparée à comprendre l'histoire engloutie. J'entends par là à travailler sur un très grand metteur en scène que le régime soviétique a longtemps voulu faire oublier : Meyerhold a été fusillé le 2 février 1940, en tant qu'ennemi du peuple, après un procès sommaire.
Il a été réhabilité en 1955.
Oui, mais seulement d'un point de vue juridique. On n'a su la vérité sur sa mort qu'en 1988. La réhabilitation esthétique a mis énormément de temps, car les esprits étaient marqués par la peur.
Votre ouvrage couvre la période 1917-1930. 1930, c'est l'année du suicide de Maïakovski, l'ami de Meyerhold. C'est aussi l'époque où celui-ci prend ses distances avec le régime, dont il est mal vu depuis longtemps.
Oui, il y a des textes de 1922 où Meyerhold dit que, si cela continue, il ne pourra plus travailler. Mais il ne manifeste pas de rupture avec le régime. C'est plutôt la culture officielle qui s'éloigne de lui. A terme, elle va le condamner comme formaliste. Mais Meyerhold se défend. Il reste communiste, et dit : "Je meurs en communiste."
C'est un homme qui n'a jamais renoncé à son utopie. Son adhésion au Parti communiste est théâtrale. Avant la révolution de 1917, il pressent qu'avec le changement de régime il aura un autre public que celui des théâtres impériaux. Pour lui, c'est essentiel. Il affirme très tôt que le public est le quatrième créateur, après l'auteur, le metteur en scène et l'acteur : il doit jouer un rôle, participer. Pour Meyerhold, si le public change, le théâtre est transformé. Et il l'a vraiment trouvé, ce public. Jusqu'en 1926-1927, il y a énormément de spectateurs populaires dans son théâtre de Moscou. Quand le régime lui reprochera de ne pas être compris par les travailleurs, il ira jouer dans les bassins ouvriers, et il prouvera que ce public est le sien.
Quels sont les autres points fondamentaux de la révolution du théâtre qu'appelle Meyerhold ?
Le décor est banni ; il devient un dispositif. Le texte n'est plus sacré, on peut l'adapter pour les besoins du spectacle, ce que Meyerhold fera même avec les classiques. Toutes les techniques du cinéma moderne sont exploitées, avec l'idée que l'on peut faire des montages. D'ailleurs, les grands cinéastes ont été formés dans les ateliers de Meyerhold, Eisenstein en premier. Il y a enfin le jeu de l'acteur, que Meyerhold renvoie au fonctionnement du cerveau. Pour lui, il y a d'abord le corps et le mouvement ; l'émotion vient après. La forme doit toujours laisser battre le coeur du contenu.
Meyerhold faisait un spectacle dans une direction, le suivant dans une autre. Chaque fois, il posait les problèmes du temps, de l'espace, de la musique, de la conjugaison de tous les arts et du jeu de l'acteur, liés au contexte politique. Quand il dut répondre à ses détracteurs, il déclara : "Comment voulez-vous que je fasse mon autocritique ? Tout mon chemin de créateur a été une autocritique." C'est très stimulant pour les jeunes gens qui veulent se consacrer au théâtre aujourd'hui.
ECRITS SUR LE THÉÂTRE, TOME II de Vsevolod Meyerhold. Traduction, préface et notes de Béatrice Picon-Vallin. L'Age d'Homme, 422 p., 33 €.
Propos recueillis par Brigitte Salino.
Béatrice Picon-Vallin, spécialiste de l'oeuvre de Vsevolod Meyerhold (1874-1940) : "Meyerhold n'a jamais renoncé à son utopie"
En 1975 paraissait le tome II des Ecrits sur le théâtre, du metteur en scène russe Vsevolod Meyerhold (1874-1940), contemporain de Stanislavski. Ce volume étant épuisé, Béatrice Picon-Vallin en publie aujourd'hui une passionnante réédition, revue et augmentée. Entretien.
D'où vient votre intérêt pour Meyerhold ?
Il est né à travers des rencontres : avec un poète, Maïakovski, à qui j'ai consacré mon DEA, et un metteur en scène, Lioubimov, le directeur de la Taganka, à Moscou, chez qui je suis allée faire un stage à la fin des années 1960. J'étais donc un peu préparée à comprendre l'histoire engloutie. J'entends par là à travailler sur un très grand metteur en scène que le régime soviétique a longtemps voulu faire oublier : Meyerhold a été fusillé le 2 février 1940, en tant qu'ennemi du peuple, après un procès sommaire.
Il a été réhabilité en 1955.
Oui, mais seulement d'un point de vue juridique. On n'a su la vérité sur sa mort qu'en 1988. La réhabilitation esthétique a mis énormément de temps, car les esprits étaient marqués par la peur.
Votre ouvrage couvre la période 1917-1930. 1930, c'est l'année du suicide de Maïakovski, l'ami de Meyerhold. C'est aussi l'époque où celui-ci prend ses distances avec le régime, dont il est mal vu depuis longtemps.
Oui, il y a des textes de 1922 où Meyerhold dit que, si cela continue, il ne pourra plus travailler. Mais il ne manifeste pas de rupture avec le régime. C'est plutôt la culture officielle qui s'éloigne de lui. A terme, elle va le condamner comme formaliste. Mais Meyerhold se défend. Il reste communiste, et dit : "Je meurs en communiste."
C'est un homme qui n'a jamais renoncé à son utopie. Son adhésion au Parti communiste est théâtrale. Avant la révolution de 1917, il pressent qu'avec le changement de régime il aura un autre public que celui des théâtres impériaux. Pour lui, c'est essentiel. Il affirme très tôt que le public est le quatrième créateur, après l'auteur, le metteur en scène et l'acteur : il doit jouer un rôle, participer. Pour Meyerhold, si le public change, le théâtre est transformé. Et il l'a vraiment trouvé, ce public. Jusqu'en 1926-1927, il y a énormément de spectateurs populaires dans son théâtre de Moscou. Quand le régime lui reprochera de ne pas être compris par les travailleurs, il ira jouer dans les bassins ouvriers, et il prouvera que ce public est le sien.
Quels sont les autres points fondamentaux de la révolution du théâtre qu'appelle Meyerhold ?
Le décor est banni ; il devient un dispositif. Le texte n'est plus sacré, on peut l'adapter pour les besoins du spectacle, ce que Meyerhold fera même avec les classiques. Toutes les techniques du cinéma moderne sont exploitées, avec l'idée que l'on peut faire des montages. D'ailleurs, les grands cinéastes ont été formés dans les ateliers de Meyerhold, Eisenstein en premier. Il y a enfin le jeu de l'acteur, que Meyerhold renvoie au fonctionnement du cerveau. Pour lui, il y a d'abord le corps et le mouvement ; l'émotion vient après. La forme doit toujours laisser battre le coeur du contenu.
Meyerhold faisait un spectacle dans une direction, le suivant dans une autre. Chaque fois, il posait les problèmes du temps, de l'espace, de la musique, de la conjugaison de tous les arts et du jeu de l'acteur, liés au contexte politique. Quand il dut répondre à ses détracteurs, il déclara : "Comment voulez-vous que je fasse mon autocritique ? Tout mon chemin de créateur a été une autocritique." C'est très stimulant pour les jeunes gens qui veulent se consacrer au théâtre aujourd'hui.
ECRITS SUR LE THÉÂTRE, TOME II de Vsevolod Meyerhold. Traduction, préface et notes de Béatrice Picon-Vallin. L'Age d'Homme, 422 p., 33 €.
Propos recueillis par Brigitte Salino.
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