samedi 19 septembre 2009

En attendant le 30 septembre 2009, soirée-débat sur Internet

Un texte de présentation de Sébastien Vaas, notre invité du 30/09 :

"L’ENFER DU VIRTUEL, ABOUTISSEMENT DE L’IDÉOLOGIE DES DROITS DE L’HOMME"

Depuis la Révolution Française, la notion de liberté individuelle a toujours été plus défendue et exaltée. Non pas que les sociétés antérieures ne connaissaient et ne reconnaissaient pas la liberté, mais jamais auparavant celle-ci n’avait été placée comme valeur suprême – au-dessus de la Nation, de l’Église et de toute autre réalité supra-personnelle. Ainsi, la déclaration universelle des Droits de l’Homme de cette époque prétendait garantir et encourager le plus possible de liberté individuelle, à condition que « celle-ci n’entrave pas celle des autres ».
Comme l’ont montré divers auteurs, nous vivons désormais dans un monde où est Bien tout ce qui accroît la liberté individuelle, et où est Mal tout ce qui la restreint et la bride. Partout dans le monde, les masses sont éduquées selon ce nouveau catéchisme, qui leur semble bien sûr plus avantageux que l’ancienne morale. Et c’est pourquoi l’émergence des mondes virtuels – Internet – a été vécu unilatéralement comme un formidable Bien.
En effet, l’exploration des mille facettes du Web – blogs, forums de discussion, chats, sites de rencontres, etc. – est une entreprise sans fin à laquelle chacun peut se livrer sans contrainte. Seul face à son écran, libéré de tout regard extérieur, l’internaute peut, au gré de ses envies, s’instruire, s’exprimer et se construire un univers virtuel qui lui est propre. Une deuxième vie émerge, une vie exaltante car apparemment dégagée de tout cadre matériel et social.
De ce point de vue, nous comprenons pourquoi Internet exerce une telle fascination sur les esprits, nourris de l’idéologie de 1789 depuis leur plus tendre enfance. En revanche, en restant sur une ligne de débat purement idéologique, il nous est impossible de comprendre pourquoi, trop souvent, les mondes virtuels se transforment en prisons subtiles desquelles les êtres ne peuvent et ne veulent plus sortir.
Aujourd’hui, un témoignage de l’envers du décor des paradis virtuels nous est fourni par Sébastien Vaas qui, dans son ouvrage L’Enfer du Virtuel paru chez l’Age d’Homme, retrace son parcours de plus de 10 ans dans les affres du Web. Fasciné dès l’âge de 14 ans par ce nouveau monde qui émergeait, réussissant très vite à y gagner sa vie tout en développant des sites communautaires de plusieurs dizaines de milliers de membres, il finira par tout quitter en 2005 pour retourner vers ce qu’il estime être la vraie vie.
A travers ce livre, il ne s’attarde pas trop sur les aspects personnels de son parcours, mais il tente de déceler quels sont les effets intérieurs qu’Internet cause inévitablement chez ses utilisateurs. Un constat objectif, dégagé de tout préjugé idéologique, apparaît alors progressivement : l’être ayant choisi le confort du virtuel avant la vie réelle se retrouve toujours plus isolé, dans une confusion mentale extrême et incapable de participer constructivement à la société. Sa nouvelle personnalité virtuelle, loin d’être une ouverture au monde, le coupe des autres, empêche toute forme de communication véritable et conduit au final vers une forme d’autisme hyperactif – le « syndrome d’Asperger » – qui est en train de devenir un fléau en Californie, sur la terre de l’industrie informatique, et qui laisse présager quelle sera la société de demain.
L’humanité finira-t-elle par se rendre compte de l’impasse vers laquelle elle se dirige en se laissant glisser vers les plaisirs du virtuel ? Rien n’est moins sûr, car les idéologies défendant la liberté individuelle sont si profondément ancrées dans les esprits que bien peu iraient jusqu’à les remettre en question. C’est une toute autre vision du monde qu’il s’agirait de retrouver, et c’est ce que tente de faire Sébastien Vaas dans la seconde partie de son livre où, à partir de son expérience de « retour dans le monde », il balise les pièges à éviter et indique des pistes pour réappréhender ce qui constituerait une authentique vie sociale naturelle.
Il n’est pas pour autant proposé dans cet ouvrage des formules toutes faites pour « mieux communiquer », ni un idéal de retour vers une Nature mythique qui n’existe pas (ou plus). Car ceux qui voudraient, à l’avenir, sortir de l’enfer du virtuel devront avant tout effectuer un profond redressement intérieur – combat pénible, porteur de souffrances, mais qui peut être mené avec succès lorsqu’on a compris qu’il s’agit d’une question de vie ou de mort.
Plutôt qu’une méthode de développement personnel, la voie qui est montrée est celle de la connaissance de soi, et surtout de ses propres travers. Car la réalité à laquelle n’avaient pas pensé les idéologues des Droits de l’Homme, c’est que l’homme laissé à lui-même n’a pas de défenses contre ses propres faiblesses. Il se laisse aller à toutes sortes d’habitudes, de névroses, de vices qui finissent par devenir des monstres ingérables – des accumulations de pathologies qui submergent l’être malgré les bonnes intentions qu’il a pu avoir en rejoignant les mondes virtuels.
L’ordre social, qui apparaît toujours trop tyrannique aux jeunes générations, est en fait un rempart contre l’effondrement intérieur qui guette tout individu livré à lui-même. On pense que la meilleure société serait celle qui accorde le plus de liberté à ses membres, mais en réalité une telle société conduit à une aliénation profonde qu’on commence à entrevoir aujourd’hui avec l’avènement d’Internet.
L’être humain a besoin de compagnons avec qui traverser les épreuves de la vie, ainsi que de repères pour se réorienter lorsqu’il sombre dans l’oubli. Il a besoin d’un ordre extérieur pour retrouver son propre ordre intérieur : voilà la vérité à laquelle reviennent ceux qui ont un sincère désir de s’en sortir.
C’est pour ces raisons que L’Enfer du Virtuel ne se termine pas sur une solution individuelle, mais qu’il invite ses lecteurs à envisager un retour vers une forme de société qui permettrait à ses membres de se pousser mutuellement vers le haut. Partant du constat que la civilisation moderne, bâtie sur les idéaux des Droits de l’Homme, n’offre plus un tel cadre, l’auteur suggère de se rassembler au sein de cellules de vie, afin de redécouvrir petit à petit ce que peut être une société organique, harmonisée avec les lois les plus élevées de l’Univers.
Il est probable que la majeure partie de l’humanité continuera sa descente vers le virtuel, et que ces mondes-là deviendront toujours plus réels et cohérents. Mais pour les êtres qui ont compris que la liberté individuelle a des limites – et qu’elle n’a aucun sens en dehors d’un cadre social harmonieux – il est temps de repenser et de reposer les bases d’une société saine afin que les générations futures disposent d’une alternative concrète aux cocons virtuels.

Sébastien Vaas

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